Le 8 mars 2018, à l’occasion de la Journée des droits des femmes, j’étais à Disneyland Paris pour animer des ateliers sur la valorisation de son image sur les réseaux sociaux à destination des salariées du parc et du siège. Il y avait beaucoup de monde dans le public, et parmi les intervenantes en plénière, Gisèle Szczyglak, co-auteure du livre « Femmes Osez (enfin) votre valeur !« , du « Guide pratique du mentoring : misez sur l’intelligence collective » et créatrice de l’« International Mentoring Center« , accompagnée de son acolyte Denise Christmann. Elles étaient venues parler de l’importance de tisser son réseau, réel et virtuel, pour se sentir en confiance et oser se lancer dans un nouveau job, une nouvelle mission, ou tout simplement pour négocier une augmentation.
Se sentir en confiance et se lancer dans des projets
Je me souviens de ce sentiment de confiance (re)découvert chez Prisma Média, à l’occasion d’une formation management suivie et partagée avec d’autres responsables d’équipe de mon niveau hiérarchique. Au-delà de ce que l’on apprenait concrètement, ce qui a surtout compté était que nous nous sommes sentis moins seuls pour gérer les situations parfois compliquées auxquelles on était confrontés au quotidien.
On savait qu’on pouvait désormais s’appeler, déjeuner ou prendre un café ensemble pour en parler et partager nos questionnements et témoignages. Cela paraît tout bête quand on travaille dans une entreprise à taille humaine mais dans ces grandes structures où des milliers de personnes se côtoient jour après jour à la cantine, dans les couloirs, à la cafet, on est vite toujours avec les mêmes personnes et il est rare de se mélanger entre services. Et puis il y a aussi la question du regard : « que vont penser les autres / mon boss / mon équipe si je me pose telle ou telle question alors que ça a l’air si évident pour d’autres managers ? » … Alors qu’on s’aperçoit, quand les langues se délient, que ces questions sont partagées. Tout comme la solitude ressentie.
Bien souvent, les auteurs qui s’inspirent de l’« approche réseau » dans les entreprises insistent sur la flexibilité induite par le fonctionnement non hiérarchisé et non centralisé. Mais ce qui est assez paradoxal, alors que le réseau est par définition social, c’est que cette organisation favorise les relations plus « interindividuelles », que réellement collectives.
- L’avantage : rapidité d’action et souplesse
- L’inconvénient : peu ou plus de dynamique collective
Ça me rappelle les espoirs et les craintes exprimées par les journalistes interrogés il y a 15 ans dans le cadre de mon mémoire de maîtrise d’Infocom à Nanterre (« le journal Le Monde et le multimédia de 1999 à 2001« ) : les plus enthousiastes parlaient déjà de cette souplesse, rapidité, fluidité, quand les plus sceptiques craignaient la mise en danger de leur ligne éditoriale : le symbole du collectif dans un média.
Mais au fait, qu’est-ce qu’un réseau ?
Gisèle Szczyglak et Denise Christmann sont revenues sur l’étymologie du mot réseau. Au départ, ce mot renvoie au latin rétis, c’est-à-dire au filet type filet de pêche, ou encore à un « ouvrage formé d’un entrelacement de fils ». C’est drôle, c’est exactement le symbole que j’avais choisi pour cette photo d’équipe au Journal des Femmes il y a environ 5 ans pour décrire mon activité réseaux sociaux. Je voyais dans cet entrelacement de fils la création de liens, le maillage entre les différentes personnes pour arriver à un objectif commun, en l’occurrence l’enrichissement du site à la fois par les journalistes et les internautes. Et puis il y avait cet aspect ludique, parce que sur les réseaux sociaux, on l’oublie souvent quand on travaille avec cet outil, mais les utilisateurs sont avant tout là pour se divertir.
Un filet, d’accord, mais pour attraper quoi ?
Cela fait près de 15 ans que je travaille sur le sujet et je n’ai toujours pas vraiment la réponse, à vrai dire. Ou plutôt, j’ai plusieurs réponses. Créer des liens dans une communauté et la développer sert tantôt à créer du trafic vers un autre site web, tantôt à fidéliser des internautes déjà acquis à la cause, tantôt à en séduire de nouveaux, ou encore à les attirer sur un événement IRL (« in real life » comme on dit dans mon bullshit job). Mon premier travail avec mes clients est d’ailleurs souvent de les aider à cerner leurs objectifs sur les réseaux sociaux, avant même de les conseiller sur ce qu’ils ont à y dire. Un peu comme si chacun avait droit à un filet « gratuit » (en apparence) et qu’il fallait absolument l’utiliser, le rendre beau, bien tissé, avec un tisseur-pêcheur sympa et drôle (le community manager). Mais sans savoir réellement quoi attraper.
D’autant que si on file la métaphore du filet de pêche, on pourrait dire que les fournisseurs de filets (Facebook en pole position) fixent eux-même les règles du jeu pour apprendre à s’en servir et les changent régulièrement sans crier gare. Un beau filet bien tissé peut soudain se détendre et ne plus servir à grand chose. Il faut alors le retravailler, autrement, et réapprendre à pêcher. Ou alors payer le fournisseur pour qu’il le raccommode, voire qu’il le lance lui-même en pleine mer, au bon endroit et au bon moment. Ça s’appelle les posts sponsorisés ou la publicité.
Et si créer des liens permettait justement de sortir du filet
Plus j’avance sur ce chemin des réseaux, et plus je m’aperçois que ce qui m’anime profondément, c’est avant tout de créer des liens pour monter des projets concrets : j’aime pouvoir toucher le résultat de mes actions et rencontrer vraiment les personnes approchées sur les réseaux, autour d’un café, une réunion ou une balade photographique. Dans ces cas-là, et dans ces cas-là seulement, ce qui se passe sur mes écrans me paraît tellement réel.
Et le collectif, tellement puissant.